Après le lycée de Vesoul, son père qui le destine à St. Cyr naturellement, l'envoie à Paris, au Collège Ste Barbe, où « comme à Louis le Grand, comme à St. Louis, les livres pornographiques passaient de mains en mains, éveillant dans nos jeunes imaginations des idées de débauche honteuses ou malsaines (…) Les nuits des vieux dortoirs surveillées par de jeunes hommes écrasés de fatigue (…) les bains en Seine avec des cabines isolés (…) tout était occasion à quelques cerveaux maladifs surexcités par de détestables lectures » (p. 124) et 125) : « Toute cette dépravation atteignit cependant beaucoup plus gravement les petits Parisiens et les jeunes exotiques que les provinciaux qui entraient au collège déjà pubères, grandis dans un atmosphère salubre, ayant beaucoup bataillé par besoin de détendre nos muscles (…) nous n'avions pas l'imagination surchauffée et malade ». Des bandes se forment : « La mienne se composait d'une dizaine de jeunes gaillards qui ne rêvaient que plaies et bosses ». Le soir, ils courent à la salle d'escrime. P. 126 : « Nos hurlements de sauvages sur le sentier de la guerre, nos allures brutales, nos courses, nos jeux où le pied et le poing avaient le grand rôle, toute cette détente enragée de jeunesse, croissant en muscles, étonnait et blessait nos camarades raffinés ». Selon sa propre description, Péroz était grand, souple et mince, exercé dans tous les sports « allant la tête au vent ; le nez très long et provocateur ». Il pense qu'il n'y a personne au monde pour lui faire baisser le regard.
La préparation pour St. Cyr se poursuit: il a 17 ans, et fréquente les bistrots du Boul'Mich, en particulier un café où trône « la sémillante Alphonsine ». Un soir lorsque Péroz entre dans ce café avec un camarade, il voit Alphonsine assise contre un brillant maréchal des logis des chasseurs à cheval, dont le personnage remplit Péroz de ravissement. « Il était mon rêve réalisé en chair et en os et d'un fort galant modèle (p. 121. « Beau gars, élancé, très pincé dans son dolman, il me plaisait infiniment. Combien j'enviais le bonheur qu'il avait d'être sous-officier de cavalerie ! ». Ils commencent à se regarder provocativement. « J'étais fort batailleur, friand de lame ». Le sang lui monte à la tête, il n'y tient plus : « M. le sous-officier, dis-je en me dressant comme un jeune coq « auriez-vous la bonté de me faire connaître la cause de l'attention persévérante que vous me témoignez par une fixité du regard ? » (…) Monsieur, je contemple votre nez qui est très grand, très gros et laid » » Très vrai Monsieur,etc » - Tout à vos ordres, Monsieur. Ils se donnent rendez-vous le surlendemain, au bois de Clamart, avec deux paires d'épées. Encore une fois, brille un soleil radieux d'avril. Ils se présentent avec leurs chapeaux haut de forme et leurs redingotes étroitement boutonnées. Le terrain est favorable. Ils enlèvent leurs redingotes, les gilets, les cravates. Or, comme récemment une ordonnance de police avait interdit le duel dans le bois, voici qu'arrivent les gendarmes ! Ils se cachent, puis recommencent. : « En cet instant, je jouis démesurément de la le vie. Jeune, bien portant, alerte (…) je suis orgueilleux de me sentir un homme ». Une longue bataille a lieu. Péroz reçoit un coup violent dans le côté droit avec l'épée de l'autre enfoncée profondément. Une large coulée rouge apparaît sous sa chemise. La blessure est lavée, pansée, ils se serrent cordialement la main, puis ils retournent au café pour trôner au haut d'une joyeuse tablée. Tout le monde parle du duel, il en éprouve de la fierté.
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