Finalement, de l'ensemble de ces règles émane une sourde litanie d'anxiété par laquelle on se défendrait contre des dangers innommables...
Comment le modèle complexe de l'honneur masculin se vit-il dans la réalité ?
Comment le modèle « chevaleresque » - participation à la violence régulée, contrôlée, se concilie avec le modèle de la distinction bourgeoise ? L'image de l'homme viril et fort et celle de la figure réservée, distinguée, angoissée, sont contradictoires ; et pourtant les deux modèles fonctionnent – peut-être se superposant même – dans la réalité.
On pourrait supposer que c'est la crainte de ne pas se montrer assez viril, assez fort qui a sécrété cette carapace ; que ce serait la peur de ne pas être au diapason par rapport à la force virile convoitée qui a suscité la réserve, la distinction, la modération. Ou alors, si, inversement, la carapace s'est formée pour supplanter l'idéal viril, elle n'a pas réussi à le supprimer. C'est avec ces contradictions que l'honneur masculin fonctionne à la fin du siècle.
L'HONNEUR PAR LE DENIGREMENT ET LA MISE A DISTANCE DE LA FEMME .
En 1900, l'honneur masculin est également défini par rapport à la femme – ou plutôt c'est la femme qui est définie par rapport à l'homme, de la manière dont témoignent les définitions du Dictionnaire Larousse:(47)
« femme n.f. Compagne de l'homm.e. Ensemble des personnes du sexe féminin : la femme est une puissance.(...) Celle qui a connu l'homme par opposition à la vierge. Celle qui est mariée, en puissance du mari : épouse (…) Personne du sexe féminin, attachée au service d'une autre personne (…) Femme de chambre, femme attachée au service intérieur d'une personne de son sexe. Femme de journée,femme employée pour un travail payé à la journée. Femme de charge, celle qui a soin du linge, de l'argenterie, etc. d'une maison. Femme de ménage, femme chargée du soin d'un ménage dans une famille en dehors de laquelle elle vit (…) Femme de lettres, femme qui écrit. Bonne femme, femme simple et bonne, vieille femme, femme du peuple, de la campagne. Femme publique ou absolum. Femme, prostituée : aller chez les femmes. PROV. Et LOC. Prov : qui femme a, guerre a, la paix est impossible dans un ménage (…) Ce que femme veut, Dieu le veut, les femmes en viennent toujours à leurs fins. Prendre maison faite et femme à faire, il est plus avantageux d'acheter une maison toute bâtie et d'épouser une jeune fille dont on formera soi-même le caractère (…) ENCYCL : Anat. Sauf par les organes génito-urinaires, l'anatomie de la femme diffère peu de celle de l'homme. Cependant, les os sont moins gros, le crâne moins volumineux, la colonne vertébrale est plus longue par rapport aux membres qui sont plus courts .PHYSIOL .La physiologie de la femme est toute entière dominée par ses fonctions de reproduction ; elle devient plus nerveuse, plus irritable, lors des menstrues. Son organisme tout entier est atteint pendant la grossesse et l'on constate fréquemment alors des gastralgies, des palpitations, des névralgies. HYG . La jeune fille ne doit pas abuser de l'hydrothérapie ni faire des exercices nécessitant des efforts violents. Les vêtements doivent être lâches ; lorsqu'elle sera réglée, elle devra au moment des menstrues éviter toute fatigue. Plus tard, sauf indications médicales, la femme ne devra pas abuser des injections vaginales. Enfin, des mictions plus fréquentes et une surveillance de la constipation lui éviteront bien des maladies abdominales.» (48))
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