En France, les punitions corporelles sont proscrites dans les écoles, mais elles sont fréquemment appliquées par les parents pour les motifs les plus futiles :
« J'ai entendu dernièrement à l'audience une mère, prévenue de mauvais traitements commis sur son enfant, faire la réponse suivante : « je corrige mon enfant tous les jours ; je le fouette avec la main ; au fur et à mesure que je le fouette, je m'excite et m'énerve et ce n'est qu'après que je me rends compte que je l'ai frappé trop fort ». Un certain nombre d'enfants deviennent idiots par suite des coups qu'ils reçoivent sur la tête J'ai jugé un père qui, pour faire taire un petit enfant de neuf ans, lui mettait le pied sur la bouche ; pour s'excuser, il répondit : « j'ai été élevé comme ça, on ne m'a jamais élevé dans du coton ». (140 ).
Proal cite également Jules Vallès qui a rempli un livre (L'enfant) avec le fiel accumulé en lui par les brutalités de son père ; il l'a dédié à « tous ceux qui crevèrent d'ennui au collège ou qu'on fit pleurer dans les familles, qui pendant leur enfance furent tyrannisés par leurs maîtres et rossés par leurs parents ». Il s'indigne sur le sort des enfants martyres : « de pauvres enfants tout petits, frêles et délicats, sont sans motif rossés à coups de poing et à coups de pied par leurs parents, frappés à coups de cravache, lancés à terre, jetés contre les murs. Les animaux n'agissent pas comme ça ».(141 ))
Dans les familles pauvres, les enfants sont parfois battus avec une incroyable brutalité parce qu'ils ont usé trop vite leurs souliers ou leurs vêtements. Un ouvrier a frappé à la figure avec un martinet en cuir son fils unique âgé de huit ans et lui avait fait vingt-sept blessures, parce qu'il avait troué ses chaussures. Un témoin avait entendu le père dire à son fils, après l'avoir cruellement battu : « Si tu crois que je travaille uniquement pour te faire réparer tes chaussures ».
On pourrait croire que l'auteur qui cite de très nombreux cas de suicide d'enfants, causés par des brutalités, des punitions injustes, des humiliations - le fait dans le but de lutter contre ces injustices, et qu'il est sincèrement compatissant... Néanmoins, son but avoué est tout autre : il s'agit de prévenir les révoltes, protéger, ménager les susceptibilités qui mènent aux excès d'orgueil :
« Lorsqu'un fils oublie toutes les marques de tendresse et de dévouement qu'il a reçues de son père, pour ne se rappeler qu'avec amertume la petite correction méritée qui lui a été infligée, on peut dire que cette rancune persistante est l'indice d'un nature mauvaise, d'un mentalité anormale. On peut même prédire qu'un jour, après s'être révolté contre l'autorité paternelle, il se révoltera contre les autorités sociales(...).des punitions (…) aigrissent les enfants et peuvent susciter en eux la haine de la famille, la haine de l'autorité, la haine de la société au point d'en faire plus tard des révolutionnaires, des anarchistes. » (142)
Précedent (69) ... Suivant (71)